J’ai terminé l’année 2017 en piteux état. J’ai passé une grosse partie de décembre à composer avec la maladie, enlisée dans la peur et furieuse d’avoir pleuré à Noël. En faisant le bilan de 2017, avant d’entreprendre une autre année avec la sclérose en plaques (SP), c’est tentant de faire la liste de ce que j’ai perdu, de ce que je ne ferai plus jamais. Ce qui est fucking déprimant. Vous n’avez pas envie de lire ce dégueulis d’apitoiement et je dois me faire violence pour être d’accord avec vous. Vous avez raison: c’est beaucoup plus tentant de contempler la page blanche de 2018, pleine de possibilités, que de ruminer les dérapages de 2017.
Prendre des résolutions, c’est un peu comme annoncer nos lacunes. On dit publiquement les raisons (en général insignifiantes) pour lesquelles on se sent nul. C’est peut-être pour ça que les gens n’aiment pas les résolutions. Personne ne veut avoir l’impression d’échouer dans la vie. C’est moche. Tandis que faire la liste des trophées de l’année écoulée peut nous aider à reconnaitre ce que nous avons fait de bon et nous donner confiance pour nous engager dans l’avenir. En faisant le bilan de 2017, je me rends compte que le changement est possible. Bon sens, que tout est possible! C’est ça l’esprit du Nouvel An, non?
Disons qu’il n’y a rien eu de nul, seulement du génial. À divers degrés.
Voyager est difficile quand on a une maladie stupide. Avec ses pavés ridicules et ses trottoirs sans bordures, Rome m’a botté le cul en 2017. C’est la place la moins accessible que j’ai visitée. J’ai quitté l’Italie avec l’égo un peu gonflé, en me disant que la chute de l’Empire romain, ils l’avaient bien méritée. Mais j’étais vraiment contente d’être venue, d’avoir vu et d’avoir vaincu. Plutôt que de m’abattre, ça m’a donné envie de continuer de voyager, à aller dans des endroits encore plus éloignés de ma zone de confort. Parce que, comme je l’ai déjà dit, si je ne le fais pas maintenant, je ne le ferai jamais.
Et jamais n’est pas une option.
Pendant une grande partie de ma vie, chanter a été une composante majeure de mon identité. Pendant des années, j’ai cru que chaque leçon, chaque heure de répétition, chaque minute de performance me sauvait la vie. Et c’était vrai. Jusqu’à ce que ça ne le soit plus. Ce serait trop long et ennuyeux à expliquer ici, mais la sclérose en plaques a tout foutu en l’air. Au fur et à mesure que mon corps s’affaiblissait, je me sentais diminuée par ce qui m’avait déjà stimulée. Après avoir essayé pendant trop longtemps de garder le chant dans ma vie, sans égard à mon incapacité, j’ai finalement été capable d’accepter que chanter ne m’apportait plus de joie. J’ai arrêté. Et d’une certaine manière, ça m’a soulagée.
O.K., je n’ai pas complètement arrêté de chanter, c’est brai.
Pas de panique, les amis. Ce n’est pas comme si j’avais supprimé le bacon. Je sais que ça peut sembler super difficile, mais je vous jure que ça ne l’a pas été. Je pense que c’est en partie grâce à mon habileté à faire de la cuisine santé qui ne goute pas le compost. Et en partie parce que mon estomac et mon intestin neurogène se sentent vraiment mieux sans fromage. Mais c’est surtout parce qu’en faisant cela, j’ai l’impression d’avoir un peu de contrôle. Si je vais me coucher le soir en pensant que rien ne peut arrêter ma SP progressive, une petite voix intervient pour me dire que peut-être ce régime-là m’aide. Y a pas un croissant qui arrive à la cheville de ça. Et je sais de quoi je parle.
Adolescente, j’ai fait un stage dans une compagnie d’opéra où mon élégante, mais terrifiante, patronne se faisait coiffer toutes les semaines. Ma snob au sang bleu était affreusement hautaine et sérieuse et, l’ai-je déjà dit, terrifiante. Comme Anna Wintour, mais plus grande et Italienne. Je voulais être comme elle quand je serais grande. Puis l’été dernier, la sclérose en plaques m’a enfin donné une raison d’être un peu plus comme, hem, appelons-la Mary.
Parce que prendre une douche, c’est difficile.
Plus ma SP progresse, plus l’idée de garder mes bras dans les airs assez longtemps pour me sécher les cheveux me fait regretter le temps où l’on portait des perruques et des tonnes de parfum. Alors, en juillet, je me suis offert un forfait laver-sécher et je ne peux plus m’en passer. En ai-je les moyens? Probablement pas, mais je réduirais le budget épicerie plutôt que de recommencer à me laver les cheveux moi-même, comme une roturière.
En clair, je suis passée à travers 2017. Je me félicite d’avoir adopté des habitudes d’hygiène géniales, que je vais garder en 2018. Mais il ne faut jamais cesser de s’améliorer. C’est ce qui fait de nous de meilleures personnes. Alors, voici mes objectifs pour l’année qui commence.
Ouaip. Le bon vieux cliché du Nouvel An. Mais écoutez-moi jusqu’au bout. Il y a tellement de recherches convaincantes sur les effets de l’exercice physique sur la SP que j’ai décidé d’intensifier mes efforts. J’ai toujours fait de l’exercice et j’ai une super physiothérapeute (#megan). Mais il n’y a aucune raison pour que je n’aille pas au gym tous les putain de jours. Même si c’est seulement cinq minutes. Parce que cinq minutes deviennent six qui deviennent sept qui peuvent ralentir la progression de la maladie beaucoup plus que de manger des raisins secs en regardant The Crown. Ça ressemble à un dilemme cornélien, mais ce que vous ne savez pas, c’est que le gym est dans mon immeuble. Ce qui veut dire que j’ai le temps d’aller m’entrainer et de regarder des séries. (Quoi, vous pensiez que des raisins secs, c’était moche? Allez vous faire foutre, c’est une délicieuse collation.)
Difficile de ne pas tomber dans le piège d’Internet quand on écrit un blogue. Toutes les heures qu’on passe devant son ordi, on se dit que c’est du travail. Mais soyons honnêtes, je me fais happer par le shopping en ligne et par les potins sur les vedettes. OMG! LE PRINCE HARRY ET MEGHAN MARKLE VONT SE MARIER! Alors quoi? Qui suis-je pour ignorer l’histoire en direct? De plus, quelle sorte de féministe je serais si je ne savais pas pourquoi nous sommes toutes en colère contre vous-savez-qui et vous-savez-qui-d’autre et vous-savez-qui-encore, et ainsi de suite. Ce n’est pas le moment de se passer d’Internet. J’ai juste à me passer d’autre chose, comme la lessive ou le brossage de dents.
Évidemment, la paix dans le monde et bla bla bla, mais ce à quoi je pense surtout, c’est à la paix intérieure. Ça pourrait bien être mon plus gros engagement de l’année. La sclérose en plaques ne s’en ira pas et je dois me ressaisir. Je dois trouver le moyen de préserver ma santé mentale quand les symptômes sont au plus fort et que j’ai l’impression que mon cerveau va éclater. Je pense que ça veut dire apprendre à méditer et trouver des conseils plus fiables que ceux des biscuits chinois ou du Dr Phil. Je vais détoxifier mon esprit, et je vais me faire aider.
Bonne année, Trippeuses et Trippeurs. Buvons à la santé des possibles, des nouveaux départs et de l’optimisme. Si vous avez envie de partager votre propre liste de trophées 2017 et vos objectifs pour 2018, j’aimerais bien les entendre.
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