Ce matin, ma neurologue a appelé pour me donner les résultats de ma dernière IRM, aussi bien dire pour larguer une bombe: «Il y a une nouvelle lésion intramédullaire importante dans la moelle latérale gauche.»
Oui, je sais. Personne ne parle comme ça. Ce que ma neurologue a dit en fait, c’est qu’il y a une nouvelle lésion dans la partie de mon cerveau qui commande l’élocution et la déglutition. La citation ci-dessus est tirée de mon rapport d’IRM. Ajoutez «intramédullaire» à la liste des mots que j’aimerais ne pas connaitre. (Je n’étais pas bonne en biologie, c’est évident.)
Avertissement: Ça va aller. Mais fallait d’abord que je fasse sortir la vapeur.
Au cours des derniers mois, j’ai fait l’expérience alarmante de perdre la voix, d’avoir du mal à parler et, parfois, d’avoir envie de vomir en buvant de l’eau. Je soupçonnais que c’était relié à ma sclérose en plaques (SP), mais pour une raison quelconque (la putain de lésion cérébrale ou le bon vieux déni?), je n’avais pas réalisé que j’étais au milieu d’une poussée. Ça fait 19 ans que je vis avec la SP, mais ça fait un bail que je n’ai pas eu de vraie poussée. Ma toute nouvelle lésion intramédullaire (c’est bien comme ça que ça s’écrit?) vient confirmer scientifiquement que la bête s’est réveillée. J’ai reçu la nouvelle comme un coup de poing dans le plexus solaire.
Plutôt que de l’accepter avec calme, j’ai éclaté en sanglots, comme une enfant. Je ne suis pas censée avoir de nouvelles lésions, j’ai été sur le Lemtrada! Qu’est-ce qui se passe? Est-ce que je laisse le stress de la covid m’atteindre? Est-ce que je mange trop de chips? Je ne dors pas assez? Je bois trop? J’ai de mauvaises fréquentations? Je jure devant Dieu que je passe la soie dentaire. Attends. C’est parce que je dis des gros mots?
Mes larmes ce matin n’étaient pas seulement des larmes de chagrin ou de frustration. C’étaient des larmes de rage. Entre ma dernière perfusion de Lemtrada (2016) et aujourd’hui, on avait statué que ma maladie ne pouvait être modifiée et on avait exclu tout traitement malgré l’aggravation de mes symptômes. Rentrez chez vous et espérez que ça ne s’aggrave pas. Attentez-vous aussi au pire, car cette merde ne va pas s’améliorer. Bref, je m’étais bel et bien fait larguer par mon médecin.
Je n’écrirai pas un spectacle d’humour ou une tragédie avec mes démarches, mais disons que ça n’a pas été facile ni rapide. J’ai finalement trouvé un autre neurologue qui n’est pas prêt à m’abandonner et qui croit qu’Ocrevus est ma meilleure option. Mais des mois de tergiversations avec l’assurance, auxquels se sont ajoutées les mesures anti-covid qui ont tout retardé, ont repoussé mon accès au médicament. Si j’avais pu commencer ce traitement six mois plus tôt, peut-être que je n’aurais jamais eu à m’inquiéter de ma moelle épinière. Je n’aurais même pas eu à essayer de comprendre de quelle façon elle pouvait m’enlever la voix et m’étouffer.
Ma frustration est difficile à exprimer. Je veux absolument parler au gérant. J’exige un remboursement et un approvisionnement à vie de ce que vous vendez, parce que:
Je vais commencer à travailler avec une orthophoniste pour protéger ma voix et pour la rééduquer. Je vais consacrer ma précieuse énergie à apprendre à avaler sans m’étouffer et je ne sais quels autres putain de trucs. Difficile d’enrichir sa vie quand on doit en consacrer une bonne partie à rattraper son retard, à récupérer des habiletés basiques que l’on tenait autrefois pour acquises.
Tout ça pour vous dire: demandez, exigez, insistez. Contrairement à ce qui arrive avec beaucoup de maladies, il n’y a pas, dans le cas de la sclérose en plaques, de consensus évident sur le traitement. Il n’y a pas deux cas identiques et les médecins ont des opinions très différentes sur la manière de traiter la maladie, bien que la recherche indique qu’une intervention précoce et efficace est essentielle. Si seulement j’avais eu le traitement X un peu plus tôt, est un regret que j’ai trop souvent ressenti.
Si vous avez l’impression que votre médecin est prêt à parier sur votre avenir, changez de médecin. Avec la SP, il ne suffit pas de réagir, il faut prévenir les poussées, point à la ligne.
Fin de la diatribe.
Merci de m’avoir écoutée, Trippeuses, Trippeurs.
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